La fatigue, une fatalité ?
Vidé, lessivé, éreinté, crevé, autant de mots qui décrivent la fatigue, ce symptôme universel que tout le monde a rencontré un jour.
Près d'un Français sur deux déclare avoir éprouvé au cours des douze derniers mois une fatigue persistante de une à plusieurs semaines. Plus du quart des personnes interrogées ont déclaré avoir souffert d'une telle période de fatigue à plusieurs reprises(1).
La fatigue est un signal d’alarme (de protection de l’organisme) : il envoie un message qui signale le fait de devoir se reposer.
Il est normal de se sentir fatigué après un effort physique ou une activité intellectuelle importante. C’est une fatigue passagère qui se résout avec le repos.
Par contre, une fatigue qui ne cède pas au repos est anormale. Une fatigue chronique est considérée comme évoluant depuis plus de 6 mois.
La fatigue est liée à plusieurs facteurs qui peuvent être intriqués : le stress, l’anxiété, les difficultés professionnelles ou familiales, la prise de médicaments, la mauvaise alimentation, les déficits en micronutriments, les maladies etc.(2)
La fatigue est un symptôme non spécifique, il est essentiel d’éliminer toutes les causes liées à une pathologie sous-jacente. Parfois la fatigue persiste et aucune cause n’est identifiée. Elle impacte négativement au quotidien la qualité de vie, alors comment trouver des leviers pour y remédier ?
Plusieurs solutions peuvent être mises en place(3).
Boire suffisamment.
Le premier besoin indispensable pour l’être humain est le besoin en eau. Boire paraît tellement évident et pourtant, un des premiers signes d’une déshydratation est la fatigue. C’est pourquoi la première recommandation nutritionnelle, en cas de fatigue, est d’apporter suffisamment d’eau par jour, idéalement à fractionner tout au long de la journée. Les besoins en eau sont évalués autour de 1,5 litres / jour minimum. Il peut s’agir d’eau du robinet, d’eau de source ou d’eau minérale (les eaux riches en magnésium sont à privilégier).
D’autres boissons peuvent se rajouter avec des effets toniques et anti-fatigue. C’est le cas du café et du thé.
Selon le SCF (Scientific Committee on Food), 300 mg de caféine par jour sont considérés comme sans risque sur la santé (une tasse de café moulu apporte en moyenne 100 mg de caféine). Toutefois il faut réserver les cafés aux moments du matin et de l’après-midi seulement, pour ne pas impacter la qualité du sommeil. Il est conseillé de ne pas sucrer ces boissons.
Quid des boissons énergisantes ?(4)
Ce sont “Les boissons qui se présentent comme possédant des propriétés stimulantes tant au niveau physique qu’intellectuel”. Elles contiennent des ingrédients tels que du sucre, de la caféine, des acides aminés (comme la taurine), des vitamines, des extraits de plantes comme le ginseng ou le guarana par exemple.
Elles ne doivent en aucun cas remplacer le besoin en eau quotidien. Elles sont à limiter : elles favorisent l'érosion de l’émail des dents et la prise de poids liée à leur teneur en sucres.
Il faut éviter de les consommer avant ou pendant une activité physique et il ne faut pas les associer avec l’alcool (2 situations qui pourraient être associées à des risques cardio-vasculaires).
Certaines populations doivent en éviter la consommation comme les enfants, les adolescents, les femmes enceintes ou allaitantes.
Prendre soin de son sommeil.
Un manque en sommeil d’une heure par jour peut suffire à conduire à une fatigue. La carence de sommeil concerne toutes les tranches d’âge. Pour bien dormir, il est conseillé :
- de pratiquer une activité physique en journée,
- de respecter des heures fixes de lever et de coucher,
- de pratiquer des rites d’endormissement (lecture, musique, méditation),
- de régler la température de la chambre autour de 18°C,
- de boire des tisanes aux vertus apaisantes telles que la camomille, la passiflore, l’aubépine ou la valériane,
- d’éviter les écrans 2 heures avant le coucher.
Bouger
Le sport fatigue mais l'absence de sport fatigue encore plus. Il s'agit de pratiquer une activité physique modérée (marche, gymnastique douce, natation) qui permet de stimuler la production d’endorphines, molécules entraînant une sensation de plénitude. L’activité physique permet l’oxygénation des cellules ce qui contribue à lutter contre la fatigue. Il est important de se “forcer” à bouger un peu tous les jours : marcher, faire ses courses, monter des escaliers etc.
Cas du sportif.
Chez le sportif, le surentraînement peut entraîner une accumulation de fatigue physique et psychique avec une baisse ou une chute des performances. Cette fatigue peut apparaître suite à des séances d'entraînement trop rapprochées ou à des volumes d'entraînement excessif. D’autres facteurs peuvent s'ajouter tels que le stress, une mauvaise hygiène de vie ou un régime alimentaire déséquilibré. Au delà des conseils développés dans cet article, il est nécessaire de réajuster les temps d'entraînement avec des temps de récupération et des périodes de travail de faible intensité et de veiller à avoir des apports énergétiques adaptés à la pratique physique avec une alimentation riche en micronutriments (vitamines et minéraux).
Manger sain
Les règles d’alimentation santé sont essentielles pour lutter contre la fatigue :
- des légumes colorés et variés à tous les repas,
- pas un jour sans un fruit,
- des produits de saison et bio si possible,
- de l'huile de colza et d’olive pour cuisiner,
- des épices tous les jours dans les assiettes,
- des poissons gras 2 fois par semaine,
- des légumes secs au moins 2 fois par semaine,
- des produits animaux issus de la filière oméga 3,
- des cuissons douces,
- du fait-maison,
- des produits bruts et à forte densité nutritionnelle,
- des céréales complètes,
- et limitation du sel, des produits sucrés, des produits raffinés et des produits ultra-transformés.
Booster la dopamine(4).
Nous avons des neurotransmetteurs dont certains ont un rôle dans la régulation de notre humeur. Un neurotransmetteur est synthétisé par un neurone grâce à des précurseurs apportés par notre alimentation et à l’aide de cofacteurs indispensables à leur synthèse.
Parmi eux, la dopamine est notre réveil matin, c’est d’ailleurs le matin qu’elle commence à être synthétisée par notre organisme. Elle stimule l’éveil, l’attention, la concentration, la motivation. Un manque de dopamine peut entraîner des réveils difficiles, de la fatigue, un manque de motivation et d’entrain, des problèmes de concentration et de mémoire, une humeur triste et un manque d’envie en général.
Pour fabriquer la dopamine, le corps a besoin de son précurseur : l’acide aminé appelé tyrosine. On le trouve dans les protéines alimentaires.
Prendre un petit déjeuner protéiné est une bonne solution pour remonter ses taux de dopamine et lutter contre la fatigue. Il peut se composer à base d’œufs, de produits laitiers, de produits à base de soja…
Si nécessaire, il peut être utile d’apporter de la L-tyrosine sous forme de compléments alimentaires, à prendre le matin.
Mais pour fabriquer la dopamine, le corps a besoin également de cofacteurs dont deux, très importants : le fer et le magnésium.
Le fer
Les globules rouges de notre sang transportent l’oxygène jusqu’aux cellules du corps avec l’aide du fer. Le fer fait respirer toutes les cellules ! Si on manque de fer, il y a moins d’apports d’oxygène pour notre cerveau et nos tissus musculaires ce qui entraîne une fatigue physique et psychique.
Le déficit en fer peut s’exprimer notamment sous forme de signes tels qu’une pâleur, des troubles de l’humeur, une chute de cheveux ou des ongles cassants. Il est fréquent chez les enfants, les adolescents, les femmes en âge de procréer, les femmes enceintes et allaitantes, les végétariens et les végétaliens, les seniors.
Pour connaître son statut en fer, on peut mesurer, via une prise de sang, la ferritine : c’est une protéine qui permet le stockage du fer. Son dosage permet de mesurer les réserves en fer dans l’organisme.
Les aliments riches en fer(5) sont les produits animaux tels que le boudin, la viande, les œufs, les poissons et les crustacés. Les produits végétaux sources de fer sont les légumineuses (lentilles, pois chiches…), les légumes à feuilles, le cacao ou encore les céréales complètes. Il faut savoir que le fer issu des produits animaux (fer dit héminique) est mieux assimilé par notre corps que le fer issu des produits végétaux (fer dit non héminique). Cependant, la vitamine C augmente l'absorption du fer issu des produits végétaux : c’est parfait alors d’associer des légumineuses avec des aliments riches en vitamine C comme les légumes et les fruits.
S’il est nécessaire de prendre un complément alimentaire, il est conseillé de choisir un fer bien assimilé par l’organisme et qui ne provoque ni constipation ni maux de ventre, c’est le cas avec une forme de bisglycinate de fer.
Le magnésium
Le magnésium permet à notre corps de produire de l’énergie à partir des aliments que nous consommons. Si le magnésium vient à manquer, il est difficile de donner à notre corps l’énergie suffisante pour être en forme ce qui entraîne de la fatigue. Le magnésium est déficitaire chez une grande partie de la population. Des signes peuvent être évocateurs d’un manque en magnésium : la fatigue bien sûr mais aussi les crampes, le tressautement des
paupières, les fourmillements des extrémités, les maux de tête, l’irritabilité…
Les aliments riches en magnésium(5) sont les légumineuses (lentilles, pois chiches, pois cassés…), les fruits de mer, les oléagineux (noix, amandes, noisettes…), les céréales complètes, le cacao et certaines eaux minérales.
En termes de compléments alimentaires en magnésium, il faut choisir une forme bien absorbée et bien tolérée par l’organisme telle qu’une forme de bisglycinate de magnésium
(idéalement associée à de la vitamine B6 et de la taurine pour optimiser son efficacité).
La spiruline, algue microscopique contient des teneurs intéressantes en fer et en magnésium, c’est pour cela qu’elle peut se retrouver dans la formulation de certains compléments alimentaires.
D’autres cofacteurs interviennent dans la synthèse de la dopamine tels que les vitamines du groupe B. Avoir un bon statut en ces vitamines est donc important. Les vitamines de ce groupe travaillent ensemble, c’est pourquoi les compléments les associent dans leur formulation
Faire le plein d’oméga 3.
Les oméga 3 (appelés EPA et DHA) sont des acides gras essentiels à nos membranes cellulaires, ils leur apportent de la fluidité : une membrane fluide permet une bonne communication entre les cellules et une bonne transmission des neurotransmetteurs dont la dopamine dont nous venons de parler. Un déficit en oméga 3 altère cette fluidité et donc entraîne des problèmes de communication des neurotransmetteurs qui ne peuvent pas bien exercer leur action, cela se traduit par de la fatigue.
Les graisses que l’on fournit à notre cerveau via l’alimentation ont une influence directe sur notre état de bien-être ou de fatigue. Les petits poissons gras(6) environ 2 fois par semaine et les huiles telles que les huiles de colza, lin, cameline ou noix, consommées au quotidien, sont de bonnes sources d’oméga 3. Un apport complémentaire peut s’avérer nécessaire sous forme d’huile de poissons riches en EPA et DHA.
Veiller à son coenzyme Q10.
Le coenzyme Q10 est une molécule anti-oxydante qui intervient dans la mitochondrie, l’usine énergétique de nos cellules. Moins de coenzyme Q10, c’est moins de production d’énergie et donc de la fatigue. Le déficit en coenzyme Q10 est lié à l’avancée en âge mais il peut être présent également en cas de stress important, d’efforts physiques extrêmes, de consommation élevée de tabac ou d’alcool ou de prise de certains traitements médicamenteux (comme les médicaments prescrits pour diminuer le cholestérol).
Le coenzyme Q10 est présent dans notre alimentation dans les viandes (de bœuf et d'agneau en particulier) et les poissons (comme les sardines).
En cas de besoin dans le choix d’un complément alimentaire, il est conseillé de choisir une forme huileuse pour une meilleure assimilation par l'organisme.
Intégrer des plantes adaptogènes(7).
Ce sont des plantes qui augmentent la capacité de résistance de l’organisme. Le stress entraîne de la fatigue or ces plantes optimisent les capacités naturelles du corps à réagir et à résister aux situations de stress (elles modifient l’expression de gènes et exercent ainsi des effets de protection contre le stress).
On peut citer par exemple le ginseng, le gingembre, l'éleuthérocoque ou la rhodiole. Le guarana, riche en caféine, est également intéressant.
Les plantes riches en vitamine C peuvent être aussi proposées : les fruits de l’acérola et de l’églantier (cynorrhodon).
S’occuper de son microbiote(8-9).
Notre tube digestif abrite de très nombreux gentils micro-organismes : bactéries, virus, parasites et champignons qui constituent le microbiote intestinal. Ce dernier est considéré comme un organe à part entière et on sait aujourd’hui qu’il joue un rôle par exemple dans le système immunitaire mais aussi dans le bon fonctionnement du cerveau. L’intestin est en lien avec le cerveau : on parle d’un axe intestin-cerveau. Si notre intestin ne va pas bien, notre cerveau en subit les conséquences et vice versa.
Il a été montré que des personnes souffrant de fatigue chronique avaient une diversité et une composition modifiées de leur microbiote par rapport aux personnes sans symptômes de fatigue.
L’alimentation impacte fortement notre microbiote : ce que l’on mange nourrit nos bactéries intestinales.
D’une part, les probiotiques sont importants pour la bonne santé du microbiote : ce sont des micro-organismes vivants qui exercent des effets positifs sur la santé. Ils fournissent de bonnes bactéries à notre flore digestive. On les trouve naturellement dans l’alimentation : yaourts, kéfir, boissons telles que le kombucha, cornichons, produits fermentés tels que le miso, pain au levain. Ils peuvent être également apportés via des compléments alimentaires. D’autre part, les prébiotiques sont utiles car ils servent de nourriture pour les bactéries de notre microbiote. Ce sont notamment les fibres issues des fruits, des légumes, des céréales complètes, ou encore des légumineuses. Les acides gras oméga 3 (dans les petits poissons gras par exemple) ont aussi des effets prébiotiques.
Enfin, les différentes solutions évoquées pour lutter contre la fatigue peuvent s’associer à d’autres approches comme par exemple la thalassothérapie, les massages relaxants, la sophrologie ou l’hypnose.
Note : Les informations de cet article n’ont pas pour objet de donner des avis de nature médicale. La prise de compléments alimentaires, si elle est nécessaire, doit être adaptée aux besoins de chacun et respecter les contre-indications des produits.
Sources
(1) Données IPSOS, mars 2020 https://www.ipsos.com/fr-fr/pres-dun-francais-sur-deux-souffre-de-la-fatigue
(2) Asthénie (fatigue) : définition, symptômes et causes https://www.ameli.fr/hauts-de-seine/assure/sante/themes/asthenie-fatigue/definition-sympto mes-causes
(3) Guide des ordonnances de nutrition. O.Coudron, B.Pourrias. Éditions de Santé, 2014. P 159-165.
(4) Boissons énergisantes : ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) : https://www.anses.fr/fr/content/boissons-%C3%A9nergisantes
(5) Ciqual, Table de composition nutritionnelle des aliments : https://ciqual.anses.fr/
(6) PNNS : https://www.mangerbouger.fr/Les-recommandations/Aller-vers/Le-poisson
(7)La phytothérapie contre la fatigue passagère. https://www.vidal.fr/maladies/psychisme/fatigue/phytotherapie-plantes.html
(8)Microbiote intestinal. INSERM. https://www.inserm.fr/dossier/microbiote-intestinal-flore-intestinale/
(9)Giloteaux, L., Goodrich, J.K., Walters, W.A. et al. Reduced diversity and altered composition of the gut microbiome in individuals with myalgic encephalomyelitis/chronic fatigue syndrome. Microbiome 4, 30 (2016).
https://microbiomejournal.biomedcentral.com/articles/10.1186/s40168-016-0171-4#citeas