Zoom sur le sucre et les édulcorants
Les sucres ou glucides sont la principale source d’énergie pour faire fonctionner notre corps.
Ils sont le carburant majeur de toutes nos cellules.
Notre cerveau, qui ne pèse qu’environ 2% du poids corporel, utilise 20% de l’énergie totale de l’organisme, en brûlant 120 grammes de glucides par jour. Il a besoin d’un apport constant en glucides.
C’est quoi un sucre (ou glucide) ?
En diététique, “sucre” désigne le saccharose ou sucre de table. Plus largement, le sucre appartient à la famille des glucides.
Les glucides sont classés en plusieurs familles :
-Les glucides simples constitués d’une molécule (les monosaccharides), ce sont des glucides qui ne peuvent pas se décomposer en d’autres molécules. C’est le cas du glucose, du fructose (dans les fruits) et du galactose (dans les produits laitiers).
-Les glucides simples constitués de 2 molécules (les disaccharides), ce sont des associations de plusieurs sucres :
-le saccharose (ou sucre dit de table) = glucose + fructose, -le lactose = glucose + galactose, -le maltose = glucose + glucose.
-Les glucides complexes (ou polysaccharides), sont l’enchainement de plusieurs glucides simples, c’est comme s’ils étaient constitués de plusieurs perles. C’est le cas de l’amidon dans les céréales.
Que deviennent les glucides dans le corps ?
Quand on consomme des glucides, ils sont transformés en molécules de glucose.
Le glucose arrive ensuite dans le sang et la glycémie augmente. La glycémie est le taux de sucre, en l'occurrence, de glucose dans le sang.
Le pancréas sécrète alors de l’insuline qui va réguler le taux de glucose dans le sang, son but étant de maintenir des taux constants. L’insuline va ainsi faire entrer le glucose dans les cellules qui en ont besoin et elle va stocker le trop plein dans le foie (sous forme de glycogène). Ces réserves de glycogène pourront être utilisées en cas de besoin, lors d’une activité physique par exemple.
La consommation excessive de sucre crée une saturation des réserves en glycogène, use le pancréas (le régulateur du sucre dans le sang) ce qui aboutit à un stockage de l'excès de sucre sous forme de cellules graisseuses. Tous les glucides n’ont cependant pas le même effet sur l’organisme.
Tous les glucides ne se valent pas.
En fonction de la nature de l’amidon qui compose un glucide et de sa teneur en fibres, il n’aura pas le même impact sur notre corps et notre santé.
Certains glucides, pauvres en fibres et/ou contenant un type d’amidon digéré rapidement, augmentent rapidement le glucose dans le sang ce qui provoque un pic d’insuline et un risque important de stockage sous forme de gras.
C’est le cas des glucides contenus dans les pains blancs, les gâteaux industriels ou les céréales sucrées du petit déjeuner…
D’autres glucides, riches en fibres et contenant un type d’amidon digéré lentement, provoquent une arrivée progressive du glucose dans le sang, une utilisation régulée de l’insuline et donc peu de risque de stockage sous forme de gras.
C’est le cas des glucides contenus dans les légumes, les légumineuses, les céréales complètes…
Pour faire le bon choix de glucides, un repère utilisable est l’indice glycémique.
L’indice glycémique (IG) mesure la vitesse à laquelle un aliment fait monter le taux de sucre dans le sang.
Les aliments à IG bas sont digérés lentement et font monter modérément et de façon durable le taux de sucre dans le sang.
Les aliments à IG haut sont digérés rapidement et entraînent une montée brutale du taux de sucre dans le sang favorisant le stockage sous forme de graisses. Cette montée est suivie d’une hypoglycémie réactive (baisse brutale du taux de sucre dans le sang) qui redonne envie de manger…
On classe les aliments selon 3 catégories d’IG : IG élevé, IG modéré et IG bas.
Voici des exemples d’IG de quelques aliments ou catégories d’aliments.
IG élevé > 70 | IG modéré 56-69 | IG bas < 55 |
Pain blanc (farine raffinée); confiseries, barres chocolatées industrielles; galettes de riz soufflé... | Flocons d’avoine traditionnels; céréales complètes; figues sèches: abricots secs... | Flocons d’avoine traditionnels; céréales complètes; figues sèches: abricots secs... |
Quand on parle de glucides et de leurs impacts, l’indice glycémique est un paramètre à prendre en compte mais pas le seul car il est incomplet. En effet, la quantité de glucides contenue dans un aliment est aussi importante (c’est la charge glycémique), elle permet de tenir compte de la portion consommée.
La pastèque a un IG élevé (75) mais une charge glycémique faible ce qui veut dire qu’il faudrait en manger vraiment beaucoup pour avoir un impact fort sur la glycémie.
L’objectif n’est pas de se promener avec son guide des indices et charges glycémiques des aliments pour préparer ses repas et choisir ses plats au restaurant, au risque de finir par en cauchemarder la nuit.
Pour autant, avoir en tête ces notions permet de faire un meilleur choix de glucides.
Quelques règles utiles :
- On ne mange pas un aliment mais un repas dans sa globalité : les associations font évoluer l’indice glycémique du repas. Des matières grasses ou des protéines associées à des glucides font baisser l’indice glycémique du repas.
- La présence de fibres fait baisser l’indice glycémique : un fruit entier (avec des fibres) et un jus de fruit (qui a perdu ses fibres) n’ont pas le même impact sur la glycémie.
- La cuisson modifie l’indice glycémique : plus on cuit, plus on augmente l’IG. Les cuissons al dente pour les pâtes sont à privilégier. Les flocons d’avoine ont un IG qui augmente à la cuisson : le mieux est donc de les déguster froid ou de rester raisonnable sur la quantité consommée s'ils ont été cuits.
- L’acidité diminue l’indice glycémique du repas, c’est le cas avec l’ajout de jus de citron ou de vinaigre dans les sauces.
En savoir plus sur le fructose ?
Le fructose est le principal sucre des fruits. Lorsqu’il est intégré à une matrice (avec des fibres) comme dans les fruits, il ne pose pas de problème.
Lorsqu’il est isolé (sirop de fructose ou HFCS : High fructose corn syrup) et ajouté à des produits industriels, il devient problématique. Il favorise la prise de poids et augmente le risque d’obésité(13).
Le sirop d’agave, même s’il a un indice glycémique faible, est riche en fructose : il est à limiter ou à éviter.
Quels sont les effets du sucre sur la santé ? (2-7)
Autant les bons glucides sont essentiels à la vie, autant le sucre en tant que tel est néfaste et fait des ravages sur notre santé.
La consommation excessive de sucres est reliée à la survenue de caries dentaires, à la prise de poids et à l’obésité, à l’augmentation des triglycérides dans le sang (ce sont des gras constituant une source d’énergie pour l’organisme mais leur excès augmente le risque cardiovasculaire), à l’augmentation de l’urée dans le sang (suggérant un mauvais fonctionnement des reins).
L'excès de sucre peut entraîner du diabète de type 2 (qui correspond à un excès durable de la concentration de glucose dans le sang, qui n’est plus régulée), des maladies cardiovasculaires et certains cancers.
Par ailleurs, l’excès de sucre perturbe notre microbiote intestinal menant à un déséquilibre de la flore intestinale appelée aussi dysbiose.
Le sucre en excès est pro-inflammatoire et génère des problèmes de fatigue, d’acné(11-12) et de fragilité immunitaire.
Depuis 2015, l’Organisation mondiale de la santé recommande de limiter les apports en sucres libres (sucres ajoutés et sucres des jus de fruits) à moins de 10 % des calories quotidiennes, soit environ 50 g/j(1).
50g de sucre c’est environ 10 cuillères à café ou environ 10 morceaux de sucre. Le problème, ce sont tous les sucres cachés que l’on ne maîtrise pas !
Qui sont les sucres cachés ?
Les sucres cachés sont en partie responsables des consommations trop élevées de sucre aujourd’hui, ils sont partout même dans des produits considérés comme salés !
Ils se trouvent dans les gâteaux, les yaourts aromatisés, les sodas, les jus de fruits, le pain de mie, les plats préparés, les crèmes glacées, les céréales du petit déjeuner, les sauces, les pizzas, la charcuterie…
Il est important de bien lire les étiquettes. Les sucres cachés s'identifient par les appellations finissant en ose telles que glucose, lactose, dextrose, fructose, maltose, sirop de maltose, sirop de glucose, sirop de glucose-fructose (ou isoglucose) mais aussi sous les noms de maltodextrine ou de sucre inverti.
Quelques règles :
- Privilégier les listes d'ingrédients courtes.
- Éviter les produits dont le premier ingrédient est le sucre ou assimilé.
Le savez-vous ?
- Les yaourts aromatisés aux fruits contiennent en moyenne l’équivalent de 2 morceaux de sucre.
- Certaines céréales du petit déjeuner peuvent contenir en moyenne l’équivalent de 3 morceaux de sucre pour une quantité d’un verre de céréales.
- Les sodas contiennent en moyenne l’équivalent de 6 morceaux de sucre par canette (encore plus pour les thés glacés sucrés).
Et les édulcorants dans tout ça ? (6-8)
Les édulcorants sont des « substances qui servent à donner une saveur sucrée aux denrées alimentaires»(6).
Ils sont d'origine végétale ou obtenus par synthèse chimique.
Les édulcorants sont autorisés en Europe dans l'alimentation humaine en tant qu'additifs alimentaires. Ils ont un pouvoir sucrant élevé.
L’Anses, Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, n’encourage pas (par manque d’éléments probants), dans le cadre d’une politique de santé publique, la substitution des sucres par des édulcorants intenses. Elle a par ailleurs étudié l’intérêt nutritionnel des édulcorants sur la population générale et a conclu au non bénéfice de la consommation d’édulcorants intenses sur le contrôle du poids, la glycémie chez les sujets diabétiques ou l’incidence du diabète de type 2.
Quelques édulcorants :
Le xylitol ou E 967
C’est un polyol extrait du bouleau. On le trouve dans des chewing-gums ou certains dentifrices.
L’érythritol ou E 968
Il fait partie de la classe des polyols. Initialement obtenu à partir de certaines algues et lichens, il est aussi fabriqué de façon chimique à partir de farine de maïs.
Le Maltitol ou E 965
Polyol également. On le trouve notamment dans les chocolats ou chewing-gums.
Le Sorbitol ou E420
Il existe à l’état naturel dans les fruits dont les pruneaux.
On le trouve par exemple dans les chewing-gums ou les dentifrices.
Ces 4 édulcorants ne présentent pas de problèmes majeurs identifiés à ce jour.
Ils auraient des effets similaires à un prébiotique, servant de bonne nourriture au microbiote intestinal. Cependant, comme tous les polyols, ils ont un fort pouvoir de fermentation (possibles ballonnements).
Le sucralose ou E 955 (7)
Il est obtenu à partir du saccharose et du chlore. On peut le trouver dans des desserts, des glaces ou encore des produits laitiers réduits en calories.
L’acésulfame K ou E 950
L’acésulfame K ou acésulfame de potassium est présent partout et notamment dans de nombreuses boissons gazeuses light.
Des études sur le rat ont suggéré un potentiel pouvoir cancérogène. Les autorités de santé n’ont pas considéré les données suffisantes pour établir le risque.
Des chercheurs ont montré que les édulcorants perturberaient le microbiote intestinal (sauf la famille des polyols) en diminuant la quantité de bonnes bactéries et en provoquant le développement de “mauvaises” bactéries. Ces modifications pourraient favoriser la résistance à l’insuline (l’insuline ne fonctionne plus correctement) et la prise de poids(9).
La stévia, édulcorant d’origine végétale (c’est une poudre obtenue à partir des feuilles de stévia au pouvoir sucrant important), plutôt considérée comme inoffensive, affecterait également le microbiote mais d’autres études sont nécessaires pour le confirmer.
Tout est une question de fréquence et de quantité...Par prudence, il ne vaut mieux pas consommer au quotidien d’édulcorants.
On s’en sort comment avec tout ce sucre ?
- On choisit les bonnes sources de glucides :
- Les légumes, les fruits;
- Les légumineuses;
- Les céréales complètes.
- On évite ou on diminue :
- Les céréales raffinées;
- Le sucre blanc; Les produits industriels; Les boissons sucrées.
- On lit les étiquettes et on traque les sucres cachés dans les produits lors des courses.
- On cuisine maison et on diminue par 2 les quantités de sucre indiquées dans les recettes pour les gâteaux et les pâtisseries.
- On remplace le sucre par des épices (épices à pain d'épices, cannelle, cardamome), par de la vanille, de la fleur d'oranger, des zestes d'agrumes ou encore de la compote sans sucre ajouté.
- On a vraiment besoin de sucrer : alors on privilégie :
- le sucre complet type sucre rapadura : il n’a pas été raffiné et garde des teneurs intéressantes en vitamines et minéraux,
- le miel (d’apiculteurs pour être certain de ne pas consommer des miels “trafiqués” avec ajout de sucre) : le miel contient des substances antioxydantes et a des propriétés d’antibiotique naturel (action anti-microbes).
- le sucre de coco : il a un indice glycémique correct et il contient des vitamines et minéraux,
- le sucre de fruits secs comme les dattes (à broyer dans des recettes de gâteaux), les fruits secs ont un indice glycémique certes plutôt élevé mais on en utilise de petites quantités et ils apportent des fibres, vitamines et minéraux.
Mais tout cela, toujours avec modération.
Connaissez-vous la miraculine ? C’est une protéine, issue du fruit appelé fruit miracle : elle n’a pas de goût quand elle est seule, mais quand elle est associée à un produit acide, ce goût acide se transforme en goût sucré. Intéressant pour éviter les ajouts de sucre ? Affaire à suivre...
Sources
(1) Note d’information sur l’apport de sucres recommandé pour les adultes et les enfants dans la directive de l’OMS, 2015.
(2) Sucres dans l’alimentation, ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) : https://www.anses.fr/fr/content/sucres-dans-l%E2%80%99alimentation
(3)Barclay AW, Petocz P, McMillan-Price J, Flood VM, Prvan T, Mitchell P, Brand-Miller JC. Glycemic index, glycemic load, and chronic disease risk--a meta-analysis of observational studies. Am J Clin Nutr. 2008 Mar;87(3):627-37 : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/18326601/
(4)Tomasello, G., Mazzola, M., Leone, A., Sinagra, E., Zummo, G., Farina, F., Damiani, P., Cappello, F., Gerges Geagea, A., Jurjus, A., Bou Assi, T., Messina, M., & Carini, F. (2016). Nutrition, oxidative stress and intestinal dysbiosis: Influence of diet on gut microbiota in inflammatory bowel diseases. Biomedical papers of the Medical Faculty of the University Palacky, Olomouc, Czechoslovakia, 160(4), 461–466 : http://biomed.papers.upol.cz/artkey/bio-201604-0001_nutrition_oxidative_stress_and_intesti nal_dysbiosis_influence_of_diet_on_gut_microbiota_in_inflammatory_bowel.php
(5)Sen T, Cawthon CR, Ihde BT, Hajnal A, DiLorenzo PM, de La Serre CB, Czaja K. Diet-driven microbiota dysbiosis is associated with vagal remodeling and obesity. Physiol Behav. 2017 May 1;173:305-317 : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28249783/
(6) Les édulcorants intenses, ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) : https://www.anses.fr/fr/content/les-%C3%A9dulcorants-intenses
(7)Magnuson BA, Roberts A, Nestmann ER. Critical review of the current literature on the safety of sucralose. Food Chem Toxicol. 2017 Aug;106(Pt A):324-355 : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28558975/
(8)Le nouveau guide des additifs, Anne-Laure Denans et LaNutrition. Éditions Thierry Souccar, 2017.
(9) Shil, A.; Chichger, H. Artificial Sweeteners Negatively Regulate Pathogenic
Characteristics of Two Model Gut Bacteria, E. coli and E. faecalis. Int. J. Mol. Sci. 2021, 22, 5228. https://www.mdpi.com/1422-0067/22/10/5228
(10) Edulcorants, site de l’EFSA (European Food Safety Authority) https://www.efsa.europa.eu/fr/topics/topic/sweeteners
(11)Penso L, Touvier M, Deschasaux M, Szabo de Edelenyi F, Hercberg S, Ezzedine K, Sbidian E. Association Between Adult Acne and Dietary Behaviors: Findings From the NutriNet-Santé Prospective Cohort Study. JAMA Dermatol. 2020 Aug 1;156(8):854-862 : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32520303/
(12) Kwon HH, Yoon JY, Hong JS, Jung JY, Park MS, Suh DH. Clinical and histological effect of a low glycaemic load diet in treatment of acne vulgaris in Korean patients: a randomized, controlled trial. Acta Derm Venereol. 2012 May;92(3):241-6. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22678562/
(13) Bray George A, Nielsen Samara Joy, Popkin Barry M. Consumption of high-fructose corn syrup in beverages may play a role in the epidemic of obesity. Am J Clin Nutr, 2004,79:537-43 : https://academic.oup.com/ajcn/article/79/4/537/4690128